Dans les années 1980-1990, lorsque l’aérobic vivait son âge d’or, il était courant que les élèves quittent leur cours de step ou d’abdos-fessiers avant la fin, plus précisément quand le coach débutait les étirements.
La raison ? On les trouvait inutiles et ennuyeux.
Depuis, les mentalités ont cheminé, et scientifiques, professionnels de santé et sportifs s’accordent désormais sur les multiples bienfaits du stretching.
Au point qu’aujourd’hui la pratique devient ultra-tendance.
Outre-Atlantique, en Australie et récemment en France, on lui fait même la part belle dans les clubs de CrossFit et de musculation, en proposant des cours pour mieux accompagner les membres dans leurs entraînements.
Et depuis quelques mois, c’est dans une version inédite que la discipline commence à s’imposer.
🧘 Le concept ?
Des coachs qui installent leurs élèves sur des tables de massage pour les étirer des pieds à la tête, au gré de manipulations aussi pointues qu’efficaces.
S’étirer pour mieux vieillir
Aux États-Unis, le stretching assisté est apparu dès 2018 ; à Los Angeles et à New York, les studios et les coachs spécialisés se multiplient, souvent formés par la célèbre Sarah Mariano (@thestretchtherapist sur Instagram).
Parmi les adeptes : Madonna, Michelle Obama, Kim Kardashian, Will Smith ou encore le rappeur Drake.
En France, la discipline voit peu à peu le jour dans des lieux qui lui sont dédiés, comme Flexlab ou Last Studio à Paris, mais aussi grâce à des coachs et kinésithérapeutes qui sont de plus en plus nombreux à se former, notamment à la méthode Be Stretch.
À l’heure où les pratiques intenses telles que le Hyrox, le cross-training ou le trail ont la cote, cet engouement pour une activité qui va à rebours des tendances s’explique :
« C’est justement parce que les gens subissent le retour de bâton de cette course à la performance sportive qu’ils ont besoin d’activités plus douces, en complément ou non. »
Aujourd’hui, on pousse les pratiquants à s’entraîner trop fort, souvent quotidiennement, parfois dans l’obscurité, donc sans correction de posture.
Résultat : le corps s’épuise, douleurs et blessures apparaissent.
« Au slogan “Deviens la meilleure version de toi-même”, le stretching assisté offre une réponse plus “less is more”, bien moins culpabilisante »,
analyse Céline Taranto, fondatrice de la méthode de barre au sol Taranto et professeure de Be Stretch.
Les adeptes de ces sports extrêmes comptent parmi les clients les plus réguliers du stretching sur table.
« On reçoit beaucoup de personnes qui s’entraînent entre quatre et dix heures par semaine, mais aussi des danseurs, des athlètes, des CSP+ stressés, des seniors et des gens qui souhaitent juste prendre soin d’eux, »
témoigne Auguste Pugnet, fondateur du studio parisien Flexlab.
Logique, puisque les effets du stretch assisté sont aussi puissants qu'immédiats.
« D'emblée, le corps se relâche profondément, la détente est quasi instantanée. Les muscles s'assouplissent, les tensions et les contractures diminuent, la posture s'améliore au fil des séances. Quant aux articulations, non seulement on en prend soin mais on peut aussi récupérer la mobilité qu'on a perdue avec le temps », constate Céline Hoareau, kiné et coach Be Stretch.
Et grâce à l'amplitude gagnée au niveau articulaire, la pompe veineuse fonctionne mieux, donc la circulation sanguine et lymphatique est boostée.
Enfin, si la méthode est souvent perçue comme anti-âge par ses adeptes, c'est aussi parce qu'elle agit sur un organe encore trop méconnu.
« Le stretching sur table libère les fascias, cette matière organique aux allures de toile d'araignée qui entoure les muscles. Or, plus ces derniers sont lubrifiés, moins il y a d'adhérences, mieux ils sont irrigués et meilleure est la production de collagène, une protéine garante de la fermeté de la peau », précise la kiné.
🧘♀️ En tandem pour maximiser les effets
Comment se déroule une séance ?
À mi-chemin entre le modelage et le cours d’étirement, la discipline ne ressemble à aucune autre.
En solo ou en cours collectif (chez Flexlab, on peut être jusqu’à huit), les pratiquants s’installent sur une table de massage, ou plus rarement sur un tapis de sol, afin que les coachs que l’on nomme « stretchers », « flexologues » ou « stretch therapists » procèdent à des manipulations visant à étirer les muscles.
Pas besoin de tenue particulière, seulement des vêtements amples et confortables.
« On utilise notre propre poids pour créer des leviers et ainsi apporter de l’espace dans le corps du client, au niveau du dos, des vertèbres, des ouvertures de hanches… »,
explique Be Aubert, fondatrice de la méthode Be Stretch, professeure de yoga et de barre sur l’île de Saint-Barthélemy.
On réalise des mouvements circulaires pour étirer les muscles et les fascias, sans échauffement préalable.
« Il n’est donc pas nécessaire d’avoir fait du sport avant, d’autant qu’il est préférable de travailler les fascias à froid », précise Be Aubert.
Et bien que la discipline attire de nombreux danseurs, elle demeure très différente de la danse et de ses techniques.
« Par exemple, pour étirer l’arrière de la jambe, on ne va pas la tirer à la manière des ballerines, mais plutôt exécuter des torsions et des rotations de hanches. Ce sont toujours des lignes complètes que l’on étire, en s’adaptant à chaque personne et à sa capacité d’amplitude », ajoute-t-elle.
Côté matériel, ni élastiques ni coussins comme en fitness ou en yoga, mais parfois une sangle de stabilisation pour se sentir calé, sécurisé — par exemple pour maintenir une jambe pendant qu’on travaille l’autre.
Et si les résultats sont encore plus bluffants qu’une séance classique, c’est parce qu’à deux, le lâcher-prise devient plus facile, donc l’impact sur le système nerveux bien plus intense.
« Le fait d’être étiré par un coach engendre la passivité totale du pratiquant, c’est ça qui fait toute la différence. Par exemple, quand on veut étirer son dos seul, en position assise avec les jambes fléchies, on a beau être le plus détendu possible, on doit mettre de la force dans les bras et les mains pour attraper les pieds et rapprocher la poitrine du sol. Tandis que sur une table, en binôme, le corps n’est absolument pas engagé musculairement ; les articulations sont totalement libérées, alors on atteint une souplesse que jamais on n’aurait pu viser en solo »,
souligne Céline Taranto.
Ainsi, au-delà des étirements, c’est aussi un travail mental qu’induit le stretching assisté, comme une invitation à se laisser porter, à faire confiance à 100 % à son stretch therapist.
🌀 Stretching global ou focalisé
Au-delà de ce manifeste commun à toutes les méthodes, les coachs procèdent chacun à leur manière.
Certains, à l’instar de ceux formés chez Be Stretch, travaillent sur le corps entier.
« Si quelqu’un vient me voir parce qu’il a mal aux doigts à force de taper sur son ordinateur, je ne vais pas seulement étirer les mains, mais tout le buste, des avant-bras en passant par le dos. À chaque séance, le corps entier est étiré durant 60 minutes pour un travail complet et une relaxation optimale », précise Be Aubert.
D’autres proposent des séances à la carte, plus courtes, durant lesquelles le stretcheur se focalise sur une zone, comme le dos ou les jambes.
Chez StretchLab ou Last Studio, on peut se faire étirer tout le corps pendant 60 à 80 minutes, ou choisir une seule zone et donc accéder à des séances plus courtes (25 à 40 minutes) et moins onéreuses.
Enfin, ce qui lie tous les acteurs de ce néo-stretching, c’est la revendication de ne se substituer ni aux kinés ni aux ostéopathes.
« Nous ne sommes pas du tout en concurrence avec eux, nous ne venons pas du monde médical, le stretching assisté reste du bien-être. En revanche, notre travail peut être très complémentaire au leur, dans un contexte de rééducation, de prévention de blessures ou même de préparation physique »,
insiste Auguste Pugnet.
Les vertus du toucher
À l’instar d’un massage, l’objectif premier du stretch assisté reste de se faire du bien, sans pression.
Là encore, le fait d’être manipulé joue un rôle essentiel.
« Dans le calme, en duo, on s’entend respirer, on écoute mutuellement nos souffles. Ça a quelque chose d’enveloppant, de rassurant : c’est de la chaleur humaine, tout simplement. »
Depuis qu’elle est coach de Be Stretch, Céline Taranto confie :
« J’ai changé dans ma pratique sportive comme dans mon quotidien ; je suis davantage dans la douceur et dans la compassion. »
L’autre point fort ? Le rééquilibrage du système hormonal provoqué entre autres par l’activation, grâce aux mouvements et au toucher, de la dopamine et de la sérotonine — les hormones du bien-être.
En somme, des sensations de détente, de réconfort et de déconnexion recherchées par tous, et sans doute de plus en plus.
« Nous sommes tous plus ou moins stressés, sous pression, avec un système nerveux à bout de souffle. Il est courant que des patients viennent me voir en voulant faire leur séance avec leurs écouteurs et leur montre connectée, car ils ne parviennent plus à s’en séparer. Mais derrière cela, on ressent beaucoup de solitude, un enfermement visuel. Alors, le fait d’être touché, même par-dessus ses habits, procure un bien-être fou »,
témoigne Céline Hoareau.
Les retours sont formels : dès la première séance de stretching assisté, on se sent plus mobile, plus grand, plus léger.
Au bout de quelques rendez-vous, la métamorphose est posturale autant que mentale.
« Une fois par semaine, une fois par mois ou par an, je ne recommande aucune fréquence : je laisse toujours les gens s’écouter »,
sourit la fondatrice de Be Stretch.
ELLE Magazine - Edition 4164 - Octobre 2025
Conclusion
Chez Flexlab, Paris 2ᵉ : à partir de 49 € les 50 minutes. flexlabstudio.fr


